Dialogue de sourd...

Publié le par ticlou.over-blog.com

Caché derrière un bloc de glace, Erlik bougonne et peste contre le jeune manchot empereur. Il aurait dû se méfier. Si la curiosité est un vilain défaut, il n’en reste pas moins qu’il faut connaître pour savoir. Pourtant, il l’avait prévenu que c’était très dangereux d’y aller mais comme tous les petits, on n’écoute pas les conseils des amis ou de la famille. On préfère découvrir soi-même et après on vient se plaindre d’un  « Ah, si j’avais su… » et les grands de répondre « On t’avait prévenu… ».

Erlik entend alors le cri de Ticlou qui l’appelle. « Et voilà, qu’est-ce que je disais… »  pense-t-il dans un profond soupir.

Désabusé, Erlik quitte sa cachette  et s’en va sauver son ami insouciant…

A la vue du grand carnassier blanc, le poil hérissé, les oreilles en arrière et les crocs menaçants, Héra et sa meute se mettent à aboyer de plus belle.

Ticlou, abasourdi, regarde tour à tour les chiens et l’ours polaire. Quand ce dernier arrive à son niveau, il se met à grogner férocement contre Héra :

- Arrière, si tu ne veux pas connaître les caresses de mes griffes !!!

- Approche encore de quelques pas et on te fait la fête !!! aboie Héra courroucée.

- Si jamais tu as touché une plume de mon ami, je t’éventre !!! rétorque Erlik.

- Viens me le dire de plus près si tu l’oses, répond le chef de meute, les yeux plein de haine.

Dans ce brouhaha cacophonique, Ticlou prend une longue inspiration et se met à crier de toutes ses forces :

- SILENCE !!!

Cet ordre surprend tout le monde. Alors profitant du calme, Ticlou enchaîne :

- Qu’est-ce que vous avez tous à crier comme cela? On ne s’entend plus à la fin !!! Et d’abord, pourquoi es-tu si agressif, Erlik ? Héra ne t’a rien fait ! Si je t’ai appelé, c’est pour te présenter Héra et ses compagnons !!!  Et toi, Héra, pourquoi tu l’attaques ? Je t’ai dit que c’était mon ami, oui ou non ?

- Mais enfin, Ticlou, je croyais que tu appelais à l’aide… répond Erlik, tout penaud.

- Eh, pingouin, ton copain est un ours !!! souligne la chienne husky.

- Et alors ? reprend Ticlou, qu’est-ce que ça change ? C’est mon ami.

- Un ami qui apprécie ta chair, si tu vois ce que je veux dire… dit –elle d’un ton sarcastique

- Les humains sont bien les tiens…  rétorque Erlik.

Durant quelques secondes, un silence règne. On se toise, on se jauge. Chacun reste sur la défensive. Pourtant, la tension baisse sensiblement. Si les chiens, comme l’ours et le manchot empereur, campent sur leur position, un respect s’établit. Un sourire apparaît par ici, un regard rieur scintille par là.

Héra est la première à réagir :

- Tout ceci est absurde ! s’exclame-t-elle. A-t-on déjà vu un pingouin faire copain avec un ours ?

- Et toi, Héra, ne trouves-tu pas extraordinaire  que justement ce « pingouin » et cet ours parlent avec toi ? s’esclaffe Ticlou.

A cette remarque succède une explosion de rires. Ticlou joue de la dérision en se moquant de lui-même. Chacun se laisse aller et raconte des anecdotes, des vérités comme toutes les fois où Erlik, affamé, a mis la pagaille chez les hommes au grand dam de la meute faussement courroucée. Héra poursuit en évoquant les chutes et autres bêtises cocasses de ses maîtres, les humains.

Ticlou conte la rencontre d Erlik et de Tarkeq…

- A ce sujet, mon cher Ticlou, dit Erlik en regardant le ciel,  le temps passe et il va falloir, comme qui dirait, reprendre la route pour retrouver notre amie à la croisée des icebergs.

- Tu as raison, Erlik , acquiesce celui-ci. Cela a été un réel plaisir de partager ce moment avec vous.

- Pareillement, répond Héra toute émue. Si la prochaine fois, vous passez dans le coin, n’hésitez pas à nous faire un petit bonjour.

- Promis ! reprennent en chœur Ticlou et Erlik en s éloignant de la station polaire.

Une porte s’ouvre du baraquement. Robert, perdu dans son travail de recherche, a cru entendre les animaux brailler... Profitant d’une pause, il sort chaudement couvert inspecter les chiens.

Tout paraît normal. Hormis peut-être un détail : ils regardent tous dans la même direction…

Voulant connaître l’objet de tant de convoitise, ses yeux suivent leur direction et ce qu’il voit le laisse totalement bouche bée.

- Eh, Louis !!! Vite ! Viens voir !!! Tu ne vas pas en croire tes yeux !!!

Au bout de quelques secondes, son collègue arrive.

- Regarde ! dit-il en pointant du doigt.

- Ca alors !!! On dirait « l’Age de Glace » !!! ricane Louis, halluciné.

Au loin, un jeune manchot empereur marche à côté d’un ours polaire.

D’un aboiement chaleureux, Héra leur souhaite bonne route.

Publié dans Conte illustré

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